Sam, un scout kaki, et Suzy sont tous deux considérés comme des "enfants à problèmes" par les adultes. Sur une île de la Nouvelle-Angleterre, en 1965, ils tombent amoureux et décident de fuguer ensemble. Les adultes partent à leur recherche alors qu'une grande tempête s'approche de l'île...
Wes Anderson porte la bienveillance de sa caméra sur la délicate histoire d'amour de deux enfants de 12 ans. Une fois de plus, il renoue avec une certaine nostalgie en plaçant son récit au milieu des 60's (on se souvient de
La Famille Tenenbaum situé dans les 70's). Et toujours fidèle à lui même, il livre un film coloré, saturé de détails visuels et aux cadrages... comment dire... "hyper-cadrés" ! Moonrise Kingdom ressemble au final à un mix entre
La Famille Tenenbaum et
Le Fantastique Mr. Fox, mais malgré son univers très familier et parfaitement reconnaissable, parvient à surprendre et émouvoir le spectateur.
Véritable maniaque des images à composition géométriques et des travellings latéraux et verticaux, Wes Anderson conserve le style qu'on lui connait, et continue de transformer la réalité en miniatures un peu figées et artificielles... Mais ne vous y trompez pas, le style Anderson à un but bien précis : forcer l'observation du spectateur en transformant son film en livre d'images (de ceux que les enfants peuvent regarder des heures...). Même si rien ne change beaucoup, la méthode s'avère toujours aussi efficace et Moonrise Kingdom dégage le délicieux parfum des jolies histoires d'antan, et la simplicité des histoires pour enfants. Le décalage fonctionne à plein entre son apparence presque enfantine et la maturité de ses thèmes, et une fois de plus un univers se forme et finit par atteindre son but : construire une belle histoire, un "conte pour adultes" simple mais pas simpliste, naïf mais pas neuneu.
Cette avalanche d'effets et de style travaille à plein pour mettre en valeur l'histoire d'amour de Moonrise Kingdom. Autour de ces deux gamins amoureux et de leur joli projet d'être ensemble, le film fait graviter le monde grave et compliqué des adultes. Cette apparence naïve et enfantine que donne Anderson à son film nous permet de retrouver, comme par magie, une simplicité de lecture de son histoire et ressentir toute la beauté celle-ci, comme débarrassé de nos interprétations d'adultes. Sam et Suzy vivent une histoire d'amour aussi importante et vitale que des adultes le feraient. Wes Anderson, sans aucune autre volonté ou message, nous permet d'en percevoir la touchante beauté. On oublie alors son style, ses acteurs (pourtant excellents) et nos filtres intellectuels s'estompent, on s'abandonne alors complètement aux personnages et à leur psychologie.
Wes Anderson, on aime ou on aime pas ! Moonrise Kingdom n'échappera certainement pas à cette règle... A la Rédaction, on adore ! Tout est dit... Maintenant il ne nous reste plus qu'à vous dire comment la délicatesse, le décalage et la drôlerie donne à ce Moonrise Kingdom toute sa qualité et sa générosité. Nous avons été séduit par ses "coup de foudres" qui tombent sur des enfants... Nous avons adoré ses adultes équipés d'oeillères qui considèrent le naturel et la normalité du comportement de Sam & Sally comme des "difficultés"... Ses scouts bêtes et méchants, ses petits animaux qui nous observent, ses batailles sanglantes, ses enfants adultes, etc... etc... Alors c'est sûr, ce n'est pas avec Moonrise Kingdom qu'Anderson nous donnera de la nouveauté stylistique, mais en regard du plaisir et de la poésie qu'il nous offre encore cette fois-ci, nous attendrons encore tout le temps qu'il faudra, patiemment, sagement et avec un large sourire aux lèvres.